L’allaitement d’un bébé prématuré est un démarrage précoce pour lequel la glande mammaire est programmée pour s’adapter aux besoins du prématuré en fonction de son terme et de sa maturité.
Allaiter un bébé prématuré est bien évidemment possible. Nous allons dans cet article comprendre ce qu’est la prématurité et la façon dont se nourrissent les bébés nés plus tôt. Nous verrons également comment la maman et son bébé s’accordent pour mettre en place un allaitement dans un environnement médicalisé et parfois anxiogène.
La prématurité
En France, la grossesse à terme est de 41 semaines d’aménorrhée (absence de règles). Lorsqu’un bébé né entre 37 et 41 SA (semaines d’aménorrhée), le bébé n’est pas envisagé comme prématuré, même si la naissance avant terme peut avoir des conséquences sur les mécanismes de succion, (la coordination entre la succion et la déglutition, la respiration et donc sur l’allaitement), la prise en charge sera la même que pour un bébé né à 3500g à 41 SA. En France on compte 55 000 à 60000 naissances par an.
Les 4 grands stades de la prématurité :
- Extrême : entre 22 SA et 27 SA +6 jours
- Grande : entre 28 SA et 31 SA +6 jours
- Modérée : entre 32 SA et 33 SA +6 jours
- Tardive : entre 34 SA et 36 SA
En ce qui concerne l’allaitement, c’est à partir de 32 SA le plus souvent, que le bébé commence à développer une succion efficace pour se nourrir par lui-même. Avant ce stade, les tétées son dites non-nutritive mais reste un élément moteur de stimulation de la lactation et l’apprentissage de la succion. Avant 28 SA les mises au sein sont tout aussi intéressantes dans le développement sensoriel et la sécurité affective qui représente dans une tétée pas moins de 80 %. Mettre son bébé à la bonne adresse sur le sein de sa maman pour lui donnner la possibilté de découvrir le sein maternel, le goût du lait, qu’il reconnait, participe à sa maturité.
La spécificité des nourrissons prématurés est leur instabilité neuro-végétative. En effet, leurs fragilités sur les plans cardio-respiratoires, digestifs et thermiques. L’immaturité est à la fois physique, physiologique, métabolique et neurologique. Ce sont ces facteurs, associés à la tonicité, la fatigabilité et l’éveil du nouveau-né, qui déterminent les faisabilités des tétées.
Certaines pathologies néonatales digestives le plus souvent nécessite également un apport en lait maternel pour préserver la flore intestinale.
Le lait maternel, un indispensable pour les bébés prématurés
La HAS (Haute Autorité de Santé) recommande pour tous les grands prématurés un apport nutritionnel essentiellement au lait de mère. En effet, le lait humain présente des bénéfices considérables pour le nourrisson, à court, moyen et long terme.
- Une réduction conséquente des risques d’infections.
- Une amélioration de la tolérance digestive.
- Un meilleur développement neurologique.
- Une diminution des complications tardives de la prématurité.
Les femmes peuvent faire le choix de ne pas allaiter ou tirer leur lait. Il est important de ne pas culpabiliser et d’accepter nos propres limites.
Si les bébés ne peuvent pas bénéficier du lait de leur maman, les lactariums fournissent du lait dit de mère donneuses pour alimenter les prématurés. Ces derniers collectent les dons de lait d’autres mères allaitantes, le précieux liquide pour ensuite l’adapter au plus près des besoins des bébés prématurés. Les apports sont souvent supérieurs à la quantité disponible dans les lactariums. Ainsi, les nourrissons en extrême et grande prématurité sont prioritaires.
Les bébés nés avant 32 SA sont nourris essentiellement par sonde gastrique. Il s’agit d’une alimentation continue à discontinue dans un premier temps pour reproduire la nutrition du cordon ombilical. Quand la maturité digestive le permet, elle devient plus importante avec des quantités progressives et une observation de la capacité à digérer. Ce mode d’alimentation n’empêche pas les mises au sein. L’allaitement de ces grands prématurés consiste principalement à favoriser les contacts en peau à peau, très importants pour bébé et maman, mais aussi pour une approche de la succion au sein.
Après 32 SA, il y a trois phases pour le prématuré à passer en alimentation autonome.
- Nutrition parentérale qui utilise la voie veineuse, qu’on tente d’ôter au plus vite.
- Nutrition entérale qui est une voie digestive par sonde gastrique en continue ou en discontinue (dit en Bolus).
- Nutrition orale, c’est-à-dire classique, par la bouche.
Les trois sont possibles en parallèle. Le bébé peut par exemple téter puis être complété par voie digestive (sonde gastrique) et avec une source veineuse d’apport en continue.
L’objectif est de parvenir à une autonomie alimentaire. Pour cela, la fréquence de la proximité et des mises au sein développent le mécanisme de succion et de lactation. L’allaitement est à la demande, la mise au sein se fait en période de veil et de sommeil car la succion est tout aussi efficace.
Cependant, il peut y avoir des retours en arrière. Il est intéressant de trouver un juste équilibre entre les besoins du bébé, le désir des parents et les décisions médicales. L’implication et l’investissement des parents dans les soins en général, et le contact à la bonne adresse du bébé sur sa maman favorise l’autonomie alimentaire.
À partir de 37 SA, le retour à la maison se fait comme pour un bébé à terme. Cependant, ces nourrissons nécessitent une certaine vigilance. En effet, ils ont un système succion/déglutition/respiration mature, mais ce sont des petits plus fatigables. Par conséquent, ils s’endorment parfois plus vite au sein, ce qui peut limiter la stimulation de la lactation et la prise de poids. La clé avec ces nouveau-nés est de comprendre que leurs besoins ne sont pas tout à fait les mêmes qu’un bébé à terme. Ainsi, ils nécessitent des tétées plus fréquentes et il est important de surveiller leurs selles et leurs urines. On peut les aider au démarrage avec une expression manuelle, aussi appelée compression mammaire, pour que le lait arrive plus rapidement.
Lorsque les mises au sein ne sont plus complexes et plus rares, la stimulation de la lactation se fait par expression manuelle et/ou au tire-lait. L’idéal est de commencer de façon précoce et intense : 8 à 10 fois par jour. L’investissement de la mère est donc encouragé et soutenu pour que la montée de lait se passe au mieux. En effet, le contexte de l’hospitalisation et l’état psychologique peuvent rendre le déclenchement et la poursuite de la lactation parfois plus complexe.
En néonatalogie, le dispositif de la fleur de lait est là pour encourager les mères dans leur lactation et évaluer l’autonomie alimentaire de son bébé. Il s’agit d’une fleur à colorier afin que la femme mesure les progrès et l’évolution de son allaitement. Un tableau journalier permet également tout comme les applications de répertorier le mode d’expression, le temps d’expression et la quantité de lait exprimée. Pas de panique, il y a des jours avec et des jours sans. La quantité n’est pas le seul moyen de mesurer l’efficacité de sa lactation.
La quantité de lait exprimée peut varier en fonction de l’état émotionnel de la maman, de la fatigue, de la douleur et du stress. La lactation étant en lien direct avec les taux hormonaux (prolactine, ocytocine), la variation de celles-ci joue un rôle indispensable dans la production et surtout l’éjection du lait. Pas d’inquiétude, la variation est transitoire et parfois en quelques jours les difficultés sont résolues.
De plus, même si la lactation ne s’est pas mise en place dès le début pour des raisons psychologiques ou médicales, il n’est jamais trop tard pour la stimuler.
Le rôle des professionnels de santé est majeur pour accompagner les mamans dans la découverte de sa lactation, du fonctionnement de ses seins et de l’expression du lait. L’objectif est de rendre les mères actrices de leur allaitement, ce qui aide à moins subir la situation et gérer de manière autonome l’alimentation de leur nourrisson.
L’hospitalisation d’un nourrisson prématuré est un passage difficile. En effet, la fragilité de l’état de santé du bébé fait vivre des moments de grandes variations émotionnelles. Les consultantes en lactation IBCLC étant peu ou pas présentes dans certaines néonatologies, il est intéressant pour les mamans de s’informer par elle-même et d’avoir leur propre consultante en lactation pour les accompagner et les protéger dans leur choix. Je recommande également en lecture, le guide de l’allaitement du prématuré pour vous éclairer dans les moments de doutes.
Voici quelques conseils pour vivre cette période :
- Favorisez au maximum le contact proximal avec votre bébé. Il y aura des fausses routes, mais les mises au sein ne comportent pas de risque, contrairement à ce qui était dit autrefois en néonatalogie.
- Faites-vous accompagner sur le plan psychologique pour faire face à l’anxiété, la culpabilité et la détresse face à l’impuissance le plus souvent.
- Demandez et acceptez du soutien. En effet, en privilégiant votre bien-être et en allégeant votre charge mentale, vos proches vous aideront à sécréter de l’ocytocine indispensable pour votre allaitement.
- Investissez le service de néonatalogie. La durée d’hospitalisation peut être longue, il est ainsi intéressant d’en faire un lieu familier et d’y apporter des éléments personnels (odeur de la maison, photo, livre, cadeaux de naissance, carnet secret) afin de s’y sentir à l’aise. Cela contribue à votre moral, renforce votre lien d’attachement et optimise votre allaitement.
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